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Sommet Europe-Afrique à Bruxelles

Sommet Europe-Afrique à Bruxelles

Sommet Europe-Afrique à Bruxelles

/ POLITIQUE / Thursday, 17 February 2022 08:32

source photo: DW

Aide au développement, démocratie, lutte antiterroriste et résurgence des coups d’Etat : les questions qui fâchent.

 Par Sneiba Mohamed   

L’Afrique retrouve l’Europe à Bruxelles pour deux jours (jeudi et vendredi) après quatre ans de non tenue d’un conclave politique où les questions qui fâchent seront abordées sur fond de situation sanitaire toujours préoccupante et d’un début de crise entre l’Otan et la Russie en Ukraine. S’il est sûr qu’en deux jours les deux camps ne pourraient pas sortir avec des solutions aux principales préoccupations de l’heure, l’on espère cependant que cette rencontre entre chefs d’Etats et de gouvernements permettra de resserrer les rangs face aux dangers qui menacent la paix dans le monde et, plus particulièrement, ceux qui resurgissent en Afrique.

 

Il ne s’agit nullement, pour une fois, d’une réunion formelle entre pays membres de deux « Unions » (UE et UA) mais bien plus sérieusement d’une communauté de destin mise à l’épreuve par plusieurs faits, tels  la riposte à la Covid-19 (qui a laissé apparaître des défaillances au niveau de la distribution des vaccins) et de la mobilisation, aux niveaux financier et militaire, pour la constitution d’une force commune capable de faire face à la menace terroriste qui pèse sur le Sahel et une bonne partie de l’Afrique de l’ouest depuis le début des années 2000.

Certes, si ces deux questions seront au centre des débats, l’actualité, elle, se focalisera probablement sur la résurgence des coups d’Etat en Afrique : Mali, Guinée, Burkina Faso, Soudan, Guinée Bissau (tentative), Tchad (succession non démocratique). A cette question d’importance, l’urgence est de trouver une réponse adéquate non seulement pour que les « transitions militaires » en cours soient très limitées dans le temps mais aussi pour couper court à ces putschs qui tuent la démocratie en Afrique. Les sanctions économiques prises à l’encontre de la junte malienne n’ont pas empêché des officiers guinéens et burkinabé d’opérer, eux aussi, leurs révolutions de palais plutôt que de monter au front de la lutte antiterroriste.

Pour discuter de ces questions, il y aura donc du beau monde, tant à la rencontre de Paris qu’à la grande réunion de Bruxelles. Le président Macron a en effet invité à l’Élysée les présidents des pays du G5 Sahel: le Niger, le Tchad et la Mauritanie (finalement représentée par son ministre des affaires étrangères), à l’exception du Mali et du Burkina Faso, suspendus des instances de l’Union africaine à la suite de coups d’Etat, et les dirigeants des pays d’Afrique de l’Ouest, en particulier ceux bordant le golfe de Guinée (Côte d’Ivoire, Ghana, Togo et Bénin), confrontés à une menace terroriste grandissante.

Du côté européen, l’Elysée accueillera les présidents du Conseil européen Charles Michel et de la Commission Ursula Von der Leyen, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, ainsi que les dirigeants des pays participant ou soutenant les différentes opérations sur le terrain comme Takuba (forces spéciales), EUTM (formation militaire) ou la mission de l’ONU Minusma. Le chef du gouvernement italien Mario Draghi sera présent, mais pas le chancelier allemand Olaf Scholz.

 

Evacuer le Mali pour ne pas être aux côtés de la milice Wagner

 

La rencontre de Paris, prélude à la grande réunion de Bruxelles, répond à un agenda français bien précis : celui du retrait de la force Barkhane (présente au Mali depuis 2012, dans sa version première Serval) à cause de profondes divergences avec Bamako. Si le motif évoqué par Paris est celui de la présence des mercenaires russes du groupe Wagner, il est tout aussi évident que c’est l’opposition de la France à la « déviation » du processus démocratique au Mali qui a exacerbé les tensions entre la junte dirigée par le colonel Assimi Goïta et le président Macron.

Le retrait des forces françaises de Barkane pourrait donc créer une plus grande instabilité dans ce pays dont les deux tiers échappent au contrôle au pouvoir central installé à Bamako depuis 2012. Ce risque est d’autant plus grand que la force européenne Takuba et celle formée par l’Onu (Munisma) risquent de suivre l’exemple de la France et laisser l’armée malienne en face des groupes terroristes et des mouvements séparatistes qui ont failli occuper Bamako, en 2012, n’eut été l’intervention du président Hollande. Les mercenaires de Wagner sont peut-être aptes à servir de garde prétorienne à la junte mais il est peu probable qu’ils disposent de la force nécessaire pour sécuriser un territoire malien de 1 241 238 km2 !

 

Les enjeux économiques pour l’Afrique

 

Si l’intérêt de l’UE est plus porté vers la sécurité et la démocratie dans le continent noir, celui des dirigeants africains tient plutôt à l’aide au développement et au partenariat qui pourraient les aider à juguler les mécontentements grandissants au sein des populations. Il devrait s’agir, pour l’Afrique, de donner suite à la promesse annoncée en décembre 2021 par Emmanuel Macron de mettre en place un « new deal financier » entre l’UE et l’UA. Alors que la France a pris la présidence tournante de l’UE au début de l’année 2022, le président français avait affirmé sa volonté de « réviser complètement » la relation entre l’UE et l’UA. Il souhaite notamment « renforcer les investissements dans les économies africaines. »

Lors de sa tournée en Afrique, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a présenté à Dakar la nouvelle stratégie d’investissements de l’UE, Global Gateway. Elle est mise en place afin de faire face à l’influence de la Chine sur le continent, via ses Nouvelles routes de la soie. Elle a ainsi annoncé plus de 150 milliards d’euros pour alimenter des projets d’infrastructures en Afrique, d’ici 2027.

Cette somme sera principalement destinée à la réduction des risques de catastrophe naturelle, aux énergies renouvelables, aux transports, à l’éducation et à l’accès à internet. La présidente de la Commission européenne a également affirmé que « les investissements seront au cœur des discussions » entre les dirigeants des deux continents à Bruxelles. Alors, attendons voir si ce sommet tiendra toutes ses promesses ou, au contraire, il ne sera qu’une rencontre mondaine entre dirigeants du nord et du sud.

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