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Progestatifs et méningiome : la pilule du lendemain Norlevo (Lévonorgestrel 1,5 mg) peut-elle causer le méningiome intracrânien (tumeur cérébrale) ?

Progestatifs et méningiome : la pilule du lendemain Norlevo (Lévonorgestrel 1,5 mg) peut-elle causer le méningiome intracrânien (tumeur cérébrale) ?

Progestatifs et méningiome : la pilule du lendemain Norlevo (Lévonorgestrel 1,5 mg) peut-elle causer le méningiome intracrânien (tumeur cérébrale) ?

/ SOCIETE / Friday, 28 March 2025 11:38

Certains progestatifs sont actuellement mis en cause dans l’augmentation du risque d’une tumeur cérébrale rare, le méningiome. Ce risque est dose dépendant, c’est-à-dire que plus la dose totale de progestatif consommé est élevée, plus le risque de méningiome augmente. La pilule du lendemain Norlevo Levonorgestrel 1,5 mg contient 50 fois la dose de progestatif présente dans la pilule contraceptive quotidienne Microval Lévonorgestrel 0,030 mg. Norlevo prise de façon répétée constitue par conséquent une quantité non négligeable de progestatif.

Du reste, l’alternative thérapeutique au Norlevo existe depuis plusieurs années, à savoir la pilule du lendemain ellaOne (Ulipristal), produite par le même laboratoire pharmaceutique que Norlevo. La pilule du lendemain ellaOne ne contient pas de progestatif.

A ce jour, les usagères des pilules contraceptives quotidiennes ne sont pas concernées par l’augmentation du risque de méningiome, car ces pilules comptent de très faibles doses de progestatif.

Les progestatifs sont des médicaments dérivés synthétiques de la testostérone ou de la progestérone. Ces médicaments sont prescrits pour la contraception féminine et dans certaines pathologies gynécologiques dont les saignements utérins anormaux, l’endométriose, l’infertilité, l’hyperandrogénie et d’autres maladies.

En 2018, l’acétate de cyprotérone (AC) fait l’objet d’une évaluation par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM, France). L’acétate de cyprotérone (AC) est contenu dans Androcur (anti-androgène) et à plus faible dose dans Diane 35 (utilisé comme contraceptif). Les personnes ayant reçu ces traitements présenteraient un risque accru de méningiome intracrânien, une tumeur cérébrale se développant à partir des méninges et pouvant de ce fait comprimer et endommager le cerveau.

Néanmoins les premiers signalements à l’ANSM de méningiome en lien avec l’usage de l’AC (Androcur, Diane 35) ont eu lieu dès 1998.  Dix ans plus tard, en 2008, le neurochirurgien français Sébastien Froehlich et son équipe communiquent los d’un congrès scientifique sur la survenue de méningiomes multiples chez les personnes recevant l’AC : « We strongly suspect cyproterone acetate as a promoting factor in the development of multiple meningiomas ». Les femmes traitées pour hyperandrogénie et les personnes en transition de genre homme vers femme ayant reçu des doses élevées d’AC sont fortement impactées.

Les cas de méningiomes sous AC vont acquérir une visibilité médiatique notamment avec la création de l’association AMAVEA en France en janvier 2019, présidée bénévolement par Emmanuelle Huet-Mignaton.

« Le but de l’association AMAVEA est de soutenir chaque victime potentielle ou avérée souffrant de méningiome qui nous contacte. Le méningiome est un effet secondaire grave de l’acétate de cyprotérone (Androcur), des progestatifs de synthèse et des œstrogènes de synthèse, tels qu’acétate de chlormadinone (Lutéran) et acétate de nomégestrol (Lutényl) »

L’association AMAVEA est agréée en France par le ministère de la Santé en juillet 2020.

Ainsi que le mentionne AMAVEA dans ses communications, des progestatifs, autres que l’AC, sont mis en cause dans la survenue de méningiomes intracrâniens. En mars 2024, le prestigieux BMJ (British Medical Journal) publie une vaste étude épidémiologique qui confirme le lien entre la prise de certains progestatifs synthétiques et le risque accru de méningiomes. Cette étude rétrospective a été réalisée par le groupement d’intérêt scientifique français Epi-phare. Epi-phare est constitué en 2018 au décours de la crise du Médiator, médicament ayant provoqué des complications cardiaques sévères. Epi-phare réunit les services de pharmaco-épidémiologie de l’ANSM et de la CNAM (Assurance maladie, France), et bénéficie de l’accès aux données massives du Système National des Données de Santé (SNDS, France).

 Depuis la mise en cause de l’AC en 2018, l’ANSM a produit plusieurs recommandations successives concernant le bon usage des progestatifs, de manière à réduire le risque de méningiome chez les personnes nécessitant ces traitements. Les produits concernés sont l’acétate de cyprotérone, chlormadinone, medroxyprogesterone, promegestone, nomegestrol, medrogestone.

 Un nouveau comité scientifique temporaire est créé par l’ANSM récemment en décembre 2024 afin d’évaluer deux autres progestatifs, le désogestrel et le fameux lévonorgestrel dont il est ici question, présent à forte dose dans la pilule du lendemain Norlevo.

Au niveau européen, les recommandations de l’Agence européenne du médicament (EMA) à ce jour portent seulement sur trois progestatifs : acétate de cyprotérone, chlormadinone, nomegestrol.

La FDA états-unienne n’a émis aucun avertissement concernant les médicaments progestatifs. L’incidence des méningiomes aux USA serait de 4,3/100 000 personnes et le lien progestatif méningiome n’y est pas démontré, rapportant toutefois que la fréquence du méningiome augmente. Les médicaments progestatifs restent donc abondamment prescrits aux USA notamment dans l’endométriose ou les saignements utérins anormaux. Peut-être en cause dans ce silence, le fait que l’acétate de cyprotérone n’ait jamais été autorisé par la FDA états-unienne, et c’est bien l’acétate de cyprotérone qui présente le risque le plus élevé de méningiome parmi tous les progestatifs mis en cause.

Cependant la situation états-unienne interroge. Si la littérature scientifique récente décrivant le lien progestatif (dont AC) méningiome est très largement française et européenne, des scientifiques états-uniens ont déjà communiqué à ce sujet, notamment dans les années 2000, et cela sans suite pour les prescripteurs et leurs patientes.

 Pour conclure, les progestatifs sont une classe de médicaments d’utilisation fréquente par les femmes cisgenres et les femmes transgenres. Le lien entre certains progestatifs, la survenue et la progression du méningiome intracrânien est aujourd’hui démontré scientifiquement. Les sociétés savantes admettent qu’un effet de classe est possible, c’est-à-dire que l’ensemble des progestatifs pourraient entrainer un risque accru de méningiome intracrânien.

 Norlevo lévonorgestrel 1,5 mg est actuellement en vente libre en pharmacie, et rien ne prouve que les utilisatrices considèrent avec attention les avertissements figurant dans la notice du médicament, indiquant que son usage doit rester exceptionnel De plus l’accessibilité sans ordonnance du produit lui confère une perception d’innocuité.

Et encore, outre-Atlantique le Planned Parenthood états-unien mentionne sur son web site que la pilule du lendemain peut être prise aussi souvent que nécessaire : « How many times can I use the morning-after pill ? Taking the morning-after pill multiple times is safe and won’t hurt you”.

La recherche scientifique internationale décrit amplement le lien progestatif méningiome depuis plusieurs années. Le lévonorgestrel, contenu à forte dose dans la pilule du lendemain Norlevo, est désormais sous surveillance du nouveau comité scientifique temporaire créé par l’ANSM. En attendant, rares sont les personnes informées de la mise en évaluation du lévonorgestrel pour le risque de méningiome.

La situation de la pilule du lendemain Norlevo lévonorgestrel 1,5 mg et son éventuel risque de méningiome illustre encore une fois l’inégalité de genre dans la santé. Le genre influence toujours largement le diagnostic, les thérapeutiques et la prise en charge des personnes en défaveur des femmes.

Pas de conflit d’intérêt.

Ce sujet a été sélectionné et présenté dans plusieurs congrès scientifiques en 2024 : AOFOG Busan, Paris Santé Femmes Paris, FIAPAC Bruxelles, et publié dans l’EGO Journal, European Society of Gynecology.

Références

https://amavea.org/

Meningioma and levonorgestrel morning-after pill – Ego Journal

https://www.endocrine-abstracts.org/ea/0016/ea0016p158

https://ansm.sante.fr/actualites/contraception-orale-et-risque-de-meningiome-nous-creons-un-comite-dexpert

https://www.fda.gov/search?s=progestins+meningioma

Custer, B., Longstreth, W. T., Phillips, L. E., Koepsell, T. D., & Van Belle, G. (2006). Hormonal exposures and the risk of intracranial meningioma in women: a population-based case-control study. BMC cancer

Gruber, T., Dare, A. O., Balos, L. L., Lele, S., & Fenstermaker, R. A. (2004). Multiple meningiomas arising during long-term therapy with the progesterone agonist megesterol acetate: Case report. Journal of neurosurgery,

What Kind of Emergency Contraception Is Best For Me?

https://www.uni.lu/fhse-fr/news/how-gender-inequalities-influence-medical-diagnosis-and-treatment

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