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Par Sneiba Mouhamed
« Mourir aux portes de l’Europe », titre d’une exposition organisée en 2012 sur le drame de la migration, illustre parfaitement le désespoir des milliers de jeunes africains, mais aussi de jeunes Arabes et autres « damnés de la terre » qui partent à l’assaut du Vieux Continent.
La comptabilité macabre de tous les jours illustre bien l’ampleur du drame : 39 migrants morts au large de la Tunisie, alors que leur embarcation de fortune cherchait à rallier l’île italienne de Lampedusa. Les informations de ce genre se suivent et se ressemblent depuis plusieurs décennies, avec, comme point de départ « phénoménal », les célèbres histoires des boats people vietnamien d’il y a 40 ans. Depuis, le phénomène a pris de l’ampleur.
Les Nations unies estiment que 281 millions de personnes vivent hors de leurs pays d’origine en 2020. En 2017, les statistiques de l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) donnent une idée assez nette de « l’état des migrations » dans le monde : 49.643.069 étrangers vivent aux USA, 12.162.083 en Allemagne, 11.640.218 en Russie, 7.830.963 au Canada et 7.873.124 en France. L’Afrique a elle aussi ses propres « étrangers » : 4.035.285 en Afrique du Sud, 1.235.088 au Nigeria, 1.227.143 en Éthiopie, 576.001 en Angola, 495.874 en Libye, 442.088 au Rwanda et 265.601, au Sénégal.
Mais ce qui est réellement préoccupant pour la communauté internationale, ce sont les migrations clandestines, qui causent chaque année des dizaines de milliers de morts. Pour les seules « routes » de la Méditerranée, notamment à partir de la Libye et de la Tunisie, le nombre de décès de migrants et de réfugiés a franchi la barre des 20.000 morts en 2020, selon les chiffres de l’OIM.
L’appel au départ, auquel répondent les jeunes africains, est un cri de désespérance, qui se pose comme l’une des problématiques de développement les plus aiguës en ce premier quart du 21e siècle. La solution, qui doit être trouvée, concerne aussi bien les pays « pourvoyeurs » de migrants que ceux qui les accueillent sans y être préparés.
Si par le passé la migration avait pour motif principal des considérations des Droits des hommes et de manque de démocratie obligeant des hommes politiques à demander l’asile politique en Europe ou en Amérique, ce sont les raisons économiques qui dominent aujourd’hui. Les Africains fuient de plus en plus la pauvreté que l’oppression.
La question des migrations est entrée de plain-pied, sur la scène internationale, au cours de ces dernières années, et particulièrement au cours de l’année 2014-2015 avec 4 millions de Syriens, qui vont d’abord chercher l’asile en Turquie puis le statut de réfugié en Europe. Une Europe qui est devenue la première destination migratoire du monde, alors que c’est d’elle qu’on partait, il y a quelques siècles, pour conquérir le monde. Une inversion des rôles que beaucoup d’habitants du Vieux Continent soumis aux contingences économiques pas toujours favorables n’acceptent pas de gaieté de cœur. Passer de continent d’émigration vers les États-Unis, le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande à continent d’immigration pour Africains et Asiatiques est un statut qui ne passe pas facilement. Dans un contexte de crise des réfugiés, l’Europe à aujourd’hui 40 millions de migrants internationaux, soit 8% d’une population totale de 505 millions.
Cette ruée vers l’Europe ne se fait pas uniquement par les voies légales régissant le flux des populations pour diverses raisons : affaires, tourismes, travail, etc. Elle a aussi transformé la Méditerranée en un vaste cimetière marin. L’essentiel de la migration en Europe vient de la rive Sud de la Méditerranée, c'est-à-dire la Turquie, les pays du Maghreb, l'Égypte, beaucoup de pays proches finalement de l’Europe.
L’immigration clandestine et le trafic des personnes préoccupent donc de part et d’autre de la Méditerranée. La pandémie du coronavirus a certes ralenti le flux, mais elle a accentué la précarité des migrants qui frappent déjà aux portes de l’Europe et ceux qui se trouvent dans les camps de réfugiés en Afrique, la grave crise sanitaire ayant détourné les esprits d’une crise qui faisait pourtant l’actualité de tous les jours.