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Exil et diaspora, Foreigners ou strangers

Exil et diaspora, Foreigners ou strangers

Exil et diaspora, Foreigners ou strangers

/ SOCIETE / Wednesday, 26 April 2023 18:41

source photo: oecd-development-matters.org

Par Dr Danielle Choucroun

Exister signifie « sortir de… », l’humanité est une masse migrante, plus d’un milliard de personnes sont en déplacement actuellement dans le monde. Migrants, réfugiés et demandeurs d’asile sont des situations correspondant à des statuts citoyens différents.

En 2020 le nombre de migrants (personne résidant dans un pays dont il n’est pas originaire depuis plus d’une année) est 281 millions de personnes, soit 3,6% de la population mondiale. En termes de mouvement de personnes, la migration est un phénomène minoritaire par rapport aux déplacements de loisirs, voyages d’affaires, motifs familiaux ou pèlerinages. (Plus d’un milliard de touristes internationaux) Néanmoins l’évolution de la migration se fait à la hausse, en 1970 trois fois moins de personnes se trouvaient en situation de migration. Les réfugiés représentent 10% des migrants internationaux. 48% des migrants sont des femmes, la moitié des migrants internationaux ont plus de 39 ans (INED2017)

S’ajoutent 84 millions de personnes en situation de déplacement forcé, parfois dans leur propre pays (en particulier en Ukraine), dont26,6 millions de réfugiés (suivant les termes de la Convention de Genève) et 4,4 millions de demandeurs d’asile (Chiffres OMS 2022).

Les pays ayant accueilli le plus de réfugiés sont la Turquie, la Colombie et l’Ouganda. Ressortissants syriens, vénézuéliens et afghans composent les groupes nationaux les plus importants de réfugiés.


Dans le passé, ce sont les Européens qui migraient à travers le monde
, désormais la majorité des migrations ont lieu à l’intérieur d’un même continent ou vers une région voisine. 40% des migrants mondiaux viennent de la Chine et de l’Inde (2019), l’Égypte premier pays africain arrive au 19e rang des pays d’émigration, les Etats-Unis sont le premier pays de destination des migrants depuis 1970. 2/3 des migrants internationaux résident dans les pays à haut revenu. 97 millions de migrants constituent la migration Sud-Sud, 89 millions la migration Sud-Nord.

On peut facilement quitter son pays, mais les dispositifs d’entrée à destination sont devenus de plus en plus sécuritaires et répressifs, générant le phénomène des sans-papiers. En pratique les politiques d’opinion continuent de faire droit en dépit des évidences sociétales : la population vieillissante nécessite de l’aide et l’individu migrant serait trois fois plus productif que celui qui reste dans le pays d’origine.

Tandis que les nantis circulent librement, études, tourisme ou voyage d’affaires, les pauvres sont punis, à la merci de l’exploitation de leur force de travail sans contrepartie décente, camps de rétention, zones d’attentes et autres enclaves.

L’humanité est une masse migrante et cette migration peut se faire sur place, par les changements de frontières, telle la constitution de l’Europe ou par le changement technologique : le nouveau « sans-papier » est-il celui qui ne maitrise pas l’usage des réseaux sociaux et des autres nouveaux moyens d’information et de communication ? Oui, le monde change, même si on reste sur place.

La migration est-elle voulue ou forcée, ou bien encore un peu des deux ?

Trois grands types de migration : la migration de main-d’œuvre peu qualifiée, qui augmentera les revenus du pays d’origine, la migration à la suite des conflits armés ou des catastrophes climatiques, la migrations des personnes expertes porteuses de compétences, à la recherche du plus offrant ou au service des groupes internationaux.

Lorsqu’on parle de « migrants », en fait on ne parle pas de migration mais du gradient socio-économique s’appliquant aux personnes. Deux termes effectivement vont qualifier les personnes quittant un territoire pour en investir un autre : expatriés ou migrants, par l’existence d’une désignation spécifique du parcours de vie, les personnes sont catégorisées favorablement ou non.

Sur le plan individuel, séparation, déchirement, maladies, blessures, lutte pour la survie, mépris, stigmatisation, la personne en situation de migration est confrontée aux règles de vie barbares imposées par les Etats aux non-citoyens et au trafic d’êtres humains, devenu plus rentable que celui des stupéfiants.

Toutes les dimensions de l’existence sont impactées : sociale, relationnelle, physique, émotionnelle, économique et politique.

Les incohérences culturelles peuvent être insurmontables, exigeant le déguisement. La personne est contrainte à des jeux de rôle variant suivant les allégeances requises pour sa survie, suivant une éthique de duplicité.

Les codes sociaux, moraux, religieux sont contradictoires rajoutant à la précarité économique une mécanique de précarisation identitaire.


Est-il possible de défier ce déracinement dans un processus d’assomption identitaire ?

La migration n’est pas seulement un flux mais une modification réciproque de l’espace : ethnicisation des quartiers urbains des grandes villes et occidentalisation de la société d’origine.

 La communauté et le territoire, dissous par les facteurs économiques ou politiques cèdent la place à la diaspora, dispositif symbolique d’affiliation, apportant appartenance, mémoire et mythe du retour, constituant un système d’étayage identitaire de l’individu lorsque le lieu est absent.


L’état de santé est corrélé à la situation socio-économique de la personne
 et ceci est particulièrement vrai en situation de migration : si le migrant a un meilleur état de santé que ceux qui restent au pays, témoignant d’une sélection par la santé à la migration, cet état de santé va s’altérer avec la durée de séjour dans le pays d’accueil, en raison notamment de facteurs sociaux dont la pénibilité du travail, la rémunération plus faible et le taux de chômage plus élevé que chez les citoyens natifs

 L’accès primaire aux services de soins (par accès primaire est désigné le premier contact avec le système de santé), puis l’accès secondaire (reconnaissance et prise en charge des besoins) est fortement inégal, tributaire des ressources de la personne, de la connaissance des établissements de santé, de la capacité à communiquer et des risques de discrimination au faciès.

La santé est un droit humain et un droit naturel qui doit s’exercer sans condition. Par l’Objectif 3 des ODD 2030, les Gouvernements se mobilisent afin d’assurer bonne santé et bien-être à tous les citoyen.nes du monde, et des progrès considérables ont déjà été réalisés, en particulier pour les maladies transmissibles dont le VIH et pour la vaccination.


Rappelons enfin que le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels,
 adopté en 1966 par l’Assemblée Générale des Nations Unies, engage les Etats à garantir les conditions matérielles et humaines nécessaires à la bonne santé des populations, incluant les personnes en déplacement.

 

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